En marge de sa conférence sur le "Futur du Travail" lors du premier forum « Femmes et industrie » qui a eu lieu le 20 novembre à Friville-Escarbotin (Somme), Muriel Pénicaud a été interviewée dans le Courrier Picard par Davide Vandevoorde.

Extrait :

Vous êtes à l'origine de l'index égalité professionnelle (calcul des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes dans l'entreprise). Ces écarts restent abyssaux.

L'index bâti avec les partenaires sociaux a changé la donne. Toutes les entreprises de plus de 50 salariés doivent publier leur index: un levier très fort de transparence et donc de transformation. Mais l'égalité réelle ne se décrète pas. Elle se construit. Le plafond de verre existe encore. notamment dans l'accès aux postes à responsabilités. Il faut continuer à faire évoluer les organisations, lutter contre les biais, revoir les critères de promotion, favoriser la parentalité partagée, développer les réseaux et le mentorat, et soutenir les femmes quand les carrières se jouent. L'index doit évoluer. J'attends beaucoup de la nouvelle directive européenne qui va renforcer la transparence des rémunérations dans les grandes entreprises.

La loi Avenir professionnel a dynamisé les filières d'enseignement professionnel. Les débats budgétaires pourraient-ils contrarier cet élan ?

C'est un détricotage progressif de la réforme de 2018 qui a porté l'apprentissage à un niveau historique, presque un million de jeunes. Mon Compte Formation a déjà offert à huit millions de personnes la possibilité de reprendre la main sur leur avenir professionnel. C'est une révolution démocratique: chacun peut choisir sa formation, sans intermédiaire. Le rabot budgétaire de Bercy - baisse des coûts contrats, réduction des primes, exclusions de formations du champ du CPF - va casser cette dynamique, avec une vision à court terme, Les compétences ne sont pas une charge: c'est le meilleur investissement que puisse faire une Nation. La France a dégringolé à la 25 place de FOCDE pour les compétences de sa population active.

Votre BD « Travailler demain » aborde l'IA. L'éducation nationale est-elle prête ? La société française est-elle prête ? Est-ce une révolution industrielle?

L'intelligence artificielle, la transition écologique, le vieillissement démographique et le changement du rapport au travail, ensemble, cela peut devenir un tsunami sans anticiper. On n'a jamais affronté cela. Il y a aussi de nouvelles opportunités. comme le montre notre BD. C'est bien une révolution industrielle, d'une ampleur et d'une vitesse jamais connues. Aucun système éducatif au monde ne peut, seul, répondre à la rapidité des transformations. La durée de vie d'une compétence acquise en formation initiale est passée, seion l'OCDE, de 30 ans à 2 ans. Et 65 % des métiers que feront nos enfants n'existent pas encore. Demain travailler et apprendre se mêleront au quotidien.. C'est une condition de liberté et de protection.

Crédits Photo : Edouard Bride

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